"CHERcheursPanthéonAssas"
ASSOCIATION DES CHERCHEURS
PARIS-PANTHéON-ASSAS-UNIVERSITé
"CHERcheursPanthéonAssas"
Samedi 29 JANVIER
à 14h
salle des actes
du centre panthéon
Aurore MJREJEN
Docteure en Philosophie, chercheuse au LCSP (Laboratoire du Changement social
et politique - Paris Diderot)
" Hannah Arendt et les droits de l'Homme "
Leonor BAZINEK
Chercheuse Associée HDR laboratoire ERICA EA 4705, Université de Rouen-Normandie
"La polis d'Arendt revisitée"
Vincent LEFEBVE
Professeur à l'Université libre de Bruxelles
"ARENDT ET LE DROIT"
LLe droit dans la pensée d'
cycle des conférences
Hannah Arendt
Samedi 24 février 2018 - "HANNAH ARENDT à ASSAS"
Samedi 13 avril 2019 - "PORTRAIT D'UNE FEMME LIBRE ET ENGAGEE"
Samedi 29 janvier 2022 - "LE DROIT DANS LA PENSEE D'HANNAH ARENDT"
Samedi 29 janvier 2022
- Salle des actes du Centre Panthéon - 14h/18h -
LE DROIT DANS LA PENSéE D'HANNAH ARENDT
Native de Linden, près de Hanovre, Hanna (née Johanna) Arendt, mena une vie très mouvementée. Elle perdit son père à sept ans à peine, fut arrêtée en Allemagne, internée dans le camp de Gurs, en France, échappa de justesse aux camps de concentration et demeura apatride pendant dix-huit avant d’être naturalisée américaine en 1951, après une parenthèse en France de 1933 à 1941.
Arendt suivit des études à l’Université de Marburg, dans laquelle l’on enseignait la théologie, le grec et la philosophie. Elle se rapprocha de Martin Heidegger, son professeur de philosophie, pour lequel elle nourrit des sentiments amoureux. A 18 ans, elle partit étudier à Fribourg sous la direction notamment du professeur Edmund Husserl, avant de rédiger sa thèse sur le concept d’amour chez Saint-Augustin, sous la direction de Karl Jaspers, à l’Université de Heidelberg. Tout au long de sa vie, elle n’adhéra qu’à un seul groupe : celui des Sionistes afin de s’opposer au Nazisme, entre 1933 et 1943.
Porte-étendard de l’antitotalitarisme, on la connaît sans doute davantage aujourd’hui pour ses expressions comme la « banalité du mal », « hommes superflus », « cadavres vivants » ou « parias » que pour sa pensée politique et philosophique. Pour reprendre la formule de Philippe Raynaud dans un entretien récent accordé au magazine Le Point, « Arendt est connue pour sa notoriété ». Elle rédigea plusieurs chefs-d’œuvre, parmi lesquels Les Origines du Totalitarisme, La crise de la culture, Sur l’antisémitisme ou Conditions de l’Homme moderne. Dans le dernier chapitre des Origines du totalitarisme, elle proposa une définition très pertinente de l’idéologie, qui contribuait au « désolement » et à la « superfluité » de l’être humain dans les société modernes.
La publication de son livre Eichmann à Jérusalem : rapport sur la banalité du mal, qui devait initialement être un simple reportage, suscita de vives polémiques. Plusieurs de ses amis rompirent tout contact avec elle, notamment Gershom Scholem, qui ne lui pardonna jamais la teneur de ses propos. Cet ouvrage heurta l’opinion pour deux raisons. La première, nous la connaissons tous, découlait de l’utilisation même de l’expression « banalité du mal », que bon nombre d’auteurs considéraient comme inappropriée pour désigner le dignitaire nazi, Adolf Eichmann, qui avait refusé de suivre les ordres de Himmler, lui ordonnant de renoncer à la solution finale.
Le second scandale résulta de l’absence d’empathie de la philosophe à l’égard des Juifs. Elle considéra le procès d’Eichmann comme un spectacle et vilipenda les Conseils Juifs qui participèrent à l’extermination de leur propre peuple. Le Nouvel Observateur publia le 26 octobre 1966 un numéro, avec à sa une, le titre suivant : « Hannah Arendt est-elle nazie ? ».
Sa relation avec Heidegger, qu’elle revit à partir des années 1950, et certains de ses écrits, comme « Réexamen du sionisme », pouvaient en effet interpeller. Une lettre adressée à Mary MacCarthy pendant la Guerre des Six jours démontra toutefois l’attachement d’Arendt à Israël et à son propre peuple. Une phrase du directeur du Centre Hannah Arendt du Bard College permet de mieux comprendre son style clivant, assertif et audacieux : « Hannah Arendt était un penseur qui ne craignait pas d’être provocante. Ce qu’elle voulait, c’était de nous faire penser. » Peut-être, aussi, nous faire réagir.
- Le droit dans la pensée d'Hannah Arendt -
« Le droit, c’est le droit d’avoir des droits, ce droit étant garanti par la citoyenneté. » Très sensible à la condition des apatrides, Hannah Arendt utilisa cette formule lors de sa préparation à la fameuse conférence d’avril 1955.
Remettant en cause le modèle des droits de l’Homme, qui ne constituait à ses yeux qu’un mirage insuffisamment concret pour permettre la protection de tous les êtres humains, elle estimait les sociétés modernes encore plus nocives pour les réfugiés que les Etats pré-démocratiques pour les apatrides. Ces derniers ne jouissant plus d’un statut national ou étatique, elles se retrouvèrent encore plus démunies après la destruction des Empires centraux.
Privilégiant la doctrine allemande qui faisait de la Nation l’organe de l’Etat, au détriment des théories françaises, Hannah Arendt rejeta le modèle de l’Etat-Nation, le plus protecteur des droits de l’Homme.
Sa défiance pour les droits de l’Homme trouve-t-elle un écho avec celle d’Edmund Burke ? Quels sont les autres apports normatifs de la pensée de Hannah Arendt ? Comment dissocie-t-elle le droit et la morale ?
Plusieurs écrivains et professeurs viendront démontrer la contemporanéité de la pensée d’Arendt, à l’aune de ses réflexions politiques, philosophiques et juridiques.
Outre ses positions sur le droit international, les droits de l’Homme et l’Etat d’Israël, nous reviendrons également sur ses réflexions sur Little Rock. Les communications seront suivies d’échanges, que nous espérons, de nouveau, nourris et constructifs.